Juillet-Août 2025

Éditorial par François-Marie Héraud

Pèlerins d'espérance

Partir en pèlerinage peut nous mener plus loin que la simple destination visée. Car se faire pèlerin révèle une quête intérieure qui nous habite, une aspiration remise tant de fois à un autre jour. Oser partir est donc un moment déterminant. 

Bien sûr, dans un pèlerinage, si l’on connaît le jour du départ, peut-on anticiper les fruits de ce parcours à venir? Ne faut-il pas simplement accepter que rien n’est garanti dans un pèlerinage et qu’il faut s’y abandonner dans la confiance?

En fait, plus nous mettrons de côté nos attentes et nos itinéraires planifiés, plus nous nous rendrons disponibles aux « surprises » du voyage, et il y en aura sûrement. Alors seulement le pèlerinage pourra devenir vraiment ce qu’il devait être dès le départ.

Et s’il est merveilleux de se rendre une fois dans sa vie à Assise, Lourdes, Fatima ou chez la Bonne Sainte Anne à Sainte-Anne-de-Beaupré, en ces lieux et en tant d’autres, le plus précieux n’est-il pas de se savoir attendu et accueilli par Dieu?

« Ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie;  il était perdu, et il est retrouvé ! »
(Luc 15, 32)

Car marcher autant de pas serait un effort en vain s’il n’y avait pas quelqu’un avec ses bras ouverts nous attendant comme pour le Fils prodigue au bout d’un parcours long et pénible, où il faut se faire pauvre et humble. En cours de route, des larmes couleront, la fatigue nous enveloppera, les blessures referont surface, mais le cœur qui languit saura qu’il a trouvé lorsqu’il sera parvenu au bout du chemin et qu’il sera temps de se réjouir.

L’espérance nous apprivoise au fil de la route parcourue, elle se révèle, mais curieusement surtout au gré des rencontres, de ces moments tout simples qui disent une présence, celle de l’inconnu rencontré, et nous mènent tout droit à l’Autre.

Accepter de se faire pèlerin de l’espérance demande de s’engager dans un parcours inattendu. Un parcours qui, s’il devient fructueux, changera le regard et libérera un cœur où la solitude et le vide pouvaient régner malgré les apparences. Pensons à la Samaritaine au puits de Jacob ou à la femme prise en flagrant délit d’adultère. Leur rencontre avec le Christ n’ont-t-elles pas tout changé pour elles? Elles ont fait un pèlerinage de l’espérance où elles ont reçu une dignité humaine, une valeur infinie et en sont reparties, tout autres, complètement libérées de leur fardeau.

L’espérance, plus qu’un beau mot ou qu’une vertu, est d’abord une invitation à suivre le Christ, à tout quitter pour le rencontrer à un moment inattendu, et ensuite, repartir transformé pour continuer la route, mais cette fois-là en l’imitant par notre vie, nos actes et nos paroles, en répandant sa Bonne Nouvelle. Car dès lors, quoi qu’il arrive, on se sait aimé, appelé par notre prénom et précieux aux yeux de Dieu.

Bon pèlerinage de l’espérance!

Union de prière!

 


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Chemins de dieu 

Cardinal Gérald Cyprien Lacroix –Archevêque de Québec

Pèlerins d'espérance

En titrant l’année Sainte 2025, Pèlerins de l’espérance, feu le pape François mettait en lumière une réalité profonde de l’itinéraire de la vie chrétienne. Il appelait ainsi tous les membres du peuple de Dieu à revisiter leur plan de voyage pour mieux en définir le parcours sans baisser les yeux sur la destination finale.

Dans un monde en proie aux incertitudes, aux guerres, aux bouleversements climatiques et aux crises de sens, les chrétiens et les chrétiennes sont appelés à marcher, non comme des touristes distraits ou des fugitifs inquiets, mais comme des pèlerins de l’espérance.

Contrairement à l’optimisme, souvent lié à des circonstances incontrôlables de la vie dans l’ordre des souhaits immédiats, l’espérance est un don qui s’enracine dans la fidélité de Dieu. Cette vertu théologale nous permet de croire que même dans la nuit, une lumière brille. Être pèlerin de l’espérance, c’est ne jamais se résigner, c’est refuser de dire que tout est perdu. C’est garder le cap quand la mer est agitée, c’est une impulsion à avancer quand le chemin devient rude.

Le pèlerinage de la vie suppose aussi une destination. Pour les croyants et croyantes, cette destination ultime est le Royaume de Dieu. Or, ce Royaume commence déjà à germer dans les gestes d’amour, les choix courageux, les solidarités silencieuses. Le pèlerin ne fuit pas le monde : il l’habite avec un regard transformé par la foi. Jésus a dit à ses disciples : « Vous êtes le sel de la terre et la lumière du monde. » (Mt 5, 13-14)

« Le pèlerin ne fuit pas le monde : il l’habite avec un regard transformé par la foi. »

Personne ne marche seul sur le chemin de l’espérance. Au Sanctuaire de Sainte-Anne de Beaupré, les pèlerins participent à l’expérience fondamentale de se retrouver avec tous ceux et celles qui cherchent à se rapprocher de Dieu. Les pèlerins de l’espérance sont des hommes et des femmes de tous les états de vie : membres de familles, prêtres, personnes consacrées, laïcs engagés. Les membres des instituts séculiers, par exemple, vivent au cœur du monde comme un ferment d’espérance discrète. Dans l’ordinaire du quotidien, ils rappellent que Dieu est à l’œuvre même là où on ne l’attend pas.

Au cours des siècles, de nombreux pèlerins ont témoigné de l’espérance qui les habitait. Dans la chapelle inférieure de la Basilique se trouvent des tableaux de nombreux hommes et femmes dont le témoignage de vie suscite l’admiration. Nous aurions tant besoin de mieux les connaître. Dans l’aujourd’hui de notre monde, dans les hôpitaux, les écoles, dans le bruit des guerres ou les couvents silencieux, des hommes et des femmes sont aussi de magnifiques illustrations de l’espérance vivante.

Le Sanctuaire est un des nombreux lieux où toute personne de bonne volonté, tout pèlerin de la vie, peut se laisser envahir par l’amour de Dieu et raviver la flamme de l’espérance. Chaque fois que nous écoutons les cris des plus pauvres, que nous accueillons les personnes marginalisées ou que nous tendons la main à ceux et celles qui chancellent, nous sommes de véritables pèlerins de l’espérance.

Le pape Léon XIV nous a indiqué la voie depuis le balcon de la Basilique Saint-Pierre, le 8 mai dernier: « Alors, sans crainte, unis main dans la main avec Dieu et entre nous, allons de l’avant. Le Christ nous précède. Le monde a besoin de sa lumière. L’humanité a besoin de Lui comme pont pour être rejoint par Dieu et par son amour. »

Offrons au monde de notre temps, nos talents et surtout le goût de l’Évangile éclairé par le témoignage crédible de la vie. Quelle belle occasion, en cette Année sainte 2025, d’avancer ensemble dans la direction de la perfection en se rappelant que l’Esprit Saint nous soutient et qu’Il nous accompagne sur nos chemins d’espérance : osons réaliser nos missions!